Le port d'Ibañeta, un passage historique

En Navarre Le port d'Ibañeta - Ibañetako lepoa, également connu sous le nom de port de Roncevaux, est un passage naturel au cœur des Pyrénées occidentales, emprunté depuis l'Antiquité. Il faisait partie de la voie romaine reliant Bordeaux à Astorga et abritait une mansio, une station de repos et d’assistance aux voyageurs, connue sous le nom de summus portus.

Le port d'Ibañeta
Un premier ermitage et hôpital de pèlerins, dédié à San-Salvador, y est attesté dès 1027, sous l’emplacement de l’actuelle chapelle. Cet établissement fut le précurseur du grand hôpital de pèlerins édifié à Roncevaux à partir de 1132. Malgré cela, un petit ermitage subsista sur place, jouant un rôle essentiel : le son de sa cloche guidait les voyageurs à travers le brouillard.

Cette chapelle moderne, inaugurée en 1965, a été construite à proximité de l'ancienne chapelle de San Salvador de Ibañeta, fondée en 1127, dont il ne reste que des vestiges.

Les vestiges de la chapelle Charlemagne en 1912

Les vestiges de l'ancienne chapelle San-Salvador
Pour traverser le Summus Pyrenaeus, l’auteur du Guide du Pèlerin écrit :

« Dans le Pays basque, la route de Saint-Jacques franchit un mont remarquable appelé Port de Cize. Pour le franchir, il y a huit milles à monter et autant à descendre. En effet, ce mont est si haut qu’il paraît toucher le ciel, celui qui en fait l’ascension croit pouvoir, de sa propre main, toucher le ciel. »

Roncevaux aurait été un point de passage stratégique à travers les siècles. Hasdrubal Barca y serait passé en 208 av. J.-C., accompagné d’éléphants de guerre, lors de la deuxième guerre punique. Un siècle plus tard, ce fut au tour des Cimbres et des Teutons. Non loin du col, la tour d’Urkulu aurait été édifiée en 28 av. J.-C. par Marcus Valerius Messalla Corvinus, en commémoration de sa victoire sur les Tarbelles.

Au Ve siècle, Suèves, Vandales, Wisigoths et Alains empruntèrent cette route romaine. En 732, ce fut au tour des troupes musulmanes de l’emprunter en sens inverse, avant d’être vaincues par Charles Martel lors de la bataille de Poitiers.

Le nom de col de Roncevaux désigne aussi le site présumé de la bataille de Roncevaux, survenue le 15 août 778. Lors de cet affrontement, l’arrière-garde de l’armée de Charlemagne, dirigée par Roland, fut attaquée par les Vascons. Cet épisode légendaire inspira La Chanson de Roland ainsi qu’une partie de la Chronique du Pseudo-Turpin. Toutefois, il est probable que la bataille ne se soit pas déroulée exactement au col de Roncevaux actuel.

Le monument du Port d'Ibañeta en 1935
Au fil des siècles, la bataille de Roncevaux s'est imposée comme un symbole fort de l'identité navarraise. En 1934, fut érigé le monument à la Paix des Pyrénées, en hommage à cet épisode légendaire relaté dans le célèbre poème épique. Toutefois, en janvier 1937, selon certaines sources, le monument aurait été détruit par une bombe ; d'autres évoquent plutôt une tempête dévastatrice. Il s'effondra définitivement en février 1941, ne laissant pour témoignage qu'une portion de l'arche de pierre éparse au sol.

Le col de Roncevaux a toujours désigné une zone de passage entre la France et l’Espagne, bien que son point exact de traversée et la frontière officielle aient varié au fil du temps.

À l’époque romaine, la voie reliant Bordeaux (Burdigala) à Astorga passait par le col de Bentarte, suivant probablement un itinéraire préhistorique. Ce tracé est attesté par le trophée romain d’Urkulu (1 419 m), proche du col, ainsi que par la mention de la voie romaine à Saint-Jean-le-Vieux, ancien relais signalé dans l’itinéraire d’Antonin. La route longeait la crête entre Saint-Jean-Pied-de-Port et le col de Roncevaux, connu sous le nom de puerto de Ibañeta en Espagne. Aujourd’hui, le col actuel se situe entièrement en territoire espagnol, la frontière étant plus bas dans la vallée, au village d’Arnéguy.

Au Moyen Âge, le chemin de Compostelle reprenait en grande partie cet ancien tracé. Il resta en usage jusqu’au XIXe siècle et fut modernisé par Napoléon Ier sous le nom de route impériale 133, avant de devenir route royale (1815-1851) puis à nouveau impériale (1851-1870). Dès 1841, il entra en concurrence avec la route côtière passant par Bayonne. En 1881, il fut finalement abandonné au profit d’un nouvel itinéraire, plus large, traversant le puerto de Ibañeta.

Aujourd’hui, la route espagnole N-135, prolongement de la route française D-933 (ex-N 133), suit ce passage en passant par Luzaide et le puerto de Ibañeta.

Le port d'Ibañeta



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